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Une instagrameuse a été condamnée à quatre ans et demi de prison en Tunisie pour diffusion délibérée de contenus à caractère obscène et quatre autres créateurs de contenus seront jugés la semaine prochaine dans la même affaire, a annoncé jeudi la radio privée Mosaïque.
Les cinq personnes – trois femmes et deux hommes dont les identités n’ont pas été communiquées –, en détention depuis lundi 28 octobre, sont poursuivies pour « harcèlement d’autrui, expression intentionnelle d’obscénités et des poses immorales ou contraires aux valeurs sociétales affectant négativement le comportement des jeunes », a ajouté Mosaïque.
L’enquête a été ouverte après la diffusion dimanche par le ministère de la justice d’un communiqué appelant les procureurs à « prendre les mesures judiciaires nécessaires et à ouvrir des enquêtes contre toute personne produisant, affichant ou publiant des données, des images et des clips vidéo avec des contenus portant atteinte aux valeurs morales ».
Le ministère a dénoncé l’utilisation croissante en Tunisie de réseaux sociaux comme TikTok et Instagram pour diffuser des contenus « contraires à la morale publique, utilisant des phrases ou apparaissant dans des situations qui enfreignent les bonnes mœurs ou sont contraires aux valeurs sociétales ».
La décision du ministère a provoqué un vaste débat sur les réseaux sociaux et dans les médias avec des internautes qui ont dénoncé un excès de propos grossiers et d’images obscènes sur les réseaux, tandis que d’autres y ont vu une nouvelle « restriction des libertés ».
Le magazine d’information en ligne Nawaat a consacré un article au sujet sous le titre « Les bonnes mœurs, nouvel alibi à la répression », estimant qu’il s’agit d’un concept « flou ». « Des comportements banals sous d’autres cieux pourraient être considérés en Tunisie comme des actes blasphématoires envers les valeurs de la société », souligne Nawaat, en citant l’exemple d’un couple s’embrassant sur la bouche dans la rue.
Le magazine, très critique du pouvoir, estime aussi que « ces arrestations interviennent dans un climat marqué par des dérives liberticides ». « Après le démantèlement méthodique du pouvoir judiciaire, les poursuites engagées contre des opposants et journalistes, la répression de la société civile, ce sont désormais les personnes influentes sur les réseaux sociaux, indépendamment de la qualité des contenus qu’elles proposent, qui sont dans la ligne de mire du régime », estime Nawaat.
L’opposition et la société civile dénoncent depuis trois ans une « dérive autoritaire » du président Kaïs Saïed, réélu le 6 octobre à une majorité écrasante (90,7 %) mais avec un très faible taux de participation (moins de 30 %).
Le Monde avec AFP
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